Le président Vladimir Poutine a déclaré que la Russie avait frappé, lundi 10 octobre, en Ukraine des infrastructures critiques, ajoutant que si les attaques ukrainiennes se poursuivaient, la réponse de Moscou serait sévère. Ces derniers jours, le Kremlin fait allusion de façon appuyée à un possible recours à des armes de destruction, laissant planer l’hypothèse d’une utilisation d’armes nucléaires dites « tactiques ».
Sur l’échelle des armes nucléaires, une bombe tactique, c’est une arme de premier échelon, d’une puissance de quelques kilotonnes. Rien à voir avec les armes nucléaires stratégiques, tirées par des missiles balistiques et dont la puissance s’élève à plusieurs dizaines de mégatonnes.
Dès la guerre froide, l’usage sur le champ de bataille du nucléaire de faible puissance a été théorisé comme une super artillerie, et pour tirer ces ogives nucléaires tactiques, Moscou a plusieurs possibilités, ce qui rend la situation d’autant plus trouble, indique Vincent Tourret, spécialiste de la culture stratégique russe à l’université de Montréal : « Du côté russe, ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’ils jouent justement sur l’ambiguïté de certaines catégories d’armes, sur leur dualité. C’est-à-dire que ce sont d’abord des missiles conventionnels, mais qui peuvent être utilisés ultimement en changeant les charges en mode nucléaire. Donc, on pense à des vecteurs du type Iskander, des missiles tactico-opératifs d’une portée de 500 kilomètres, on pense aux missiles de croisière de type KH101 qui sont tirés par les bombardiers ; ensuite, vous avez les missiles de croisière navale de type Kalibr. La doctrine militaire et nucléaire russe, c’est comme une grille, elle établit un chemin d’escalade avec plusieurs seuils. Il y a des critères normalement à respecter. Ce qui est inquiétant là encore, c’est que plusieurs de ces critères ont été franchis : la mobilisation générale, les annonces de tests stratégiques et un Grom, le nom de l’exercice nucléaire qu’ils font cette année. Ils annoncent des tests en mer Noire d’un nouveau vecteur nucléaire, ce qui serait alors une rupture. Car il faut bien comprendre que faire appel au nucléaire et menacer de faire des exercices, cela montre une perte de contrôle sur la situation. » Tout péril existentiel contre la Russie entraînerait une riposte nucléaire, martèle Vladimir Poutine.